Un autre monde : Du Nord au Sud

Bien reposés dans des grands lits sous la traditionnelle couette en Islande, ça nous change des lits superposés et des sacs de couchage de la veille au refuge de Dreki dans l’Askja.
Petit déjeuner copieux avec une table couverte de produits maison : confitures, pain, et encore de la truite fumée (je ne m’en lasse pas !), et c’est repu qu’on abandonne presque à regret, la guesthouse Trod North à Laugar, non sans avoir jeté un coup d’œil à sa source chaude particulière qui alimente la piscine, et aux fleurs variées dans le jardin, fierté de la propriétaire.

la guesthouse de Trod North
La guesthouse Trod North

Il nous faut repasser par Godafoss pour accéder à la piste Sprengisandur, et nous en profitons pour jeter un œil à la cascade de Geitafoss, qu’on situe en amont de son ainée, et qu’on distingue de loin depuis la route de Myvatn.

Cascade de Geitafoss

Geitafoss est une autre chute modeste visible depuis la passerelle piétonne qui enjambe la rivière : quelques mètres de haut, deux sauts sur les côtés qui se rassemblent en écumant dans le lit en contrebas. Au-delà le pont routier enjambe élégamment l’eau verte de la Skjálfandafljót qui alimente ces deux cascades.

Le pont routier sur la Skjálfandafljót

La route 842 que nous empruntons d’abord doit nous mener à la fameuse et redoutée piste F26 ou Sprengisandur. Elle part depuis le RN1 non loin de là, remontant le cours du fleuve qui alimente Godafoss, dans une verte vallée aux fermes disséminées ça et là.
Pas mal de moutons sur la route, qui y restent stoïquement presque jusqu’au dernier moment pour s’échapper dans les prairies en contrebas.

quelques moutons sur la route…

Ici c’est une zone agricole avec les vastes pâtures arrosées par la rivière ainsi que des élevages de chevaux islandais, race particulière avec ses cinq allures de marche et leur silhouette caractéristique auquel les islandais sont farouchement attachés.
Dans un champ, des dizaines de chevaux paissent et malgré les barbelés, s’éloignent doucement quant on s’approche, ils gardent leur caractère sauvage et méfiant !

Chevaux islandais dans la vallée

Dans un paysage de vallée glaciaire encaissée, des pâturages, des fermes et au milieu coule une rivière…
De belles linaigrettes blanches et vaporeuses poussent dans les zones humides, qui ne manquent pas parmi les paysages que traverse la route.

Linaigrettes blanches et vaporeuses

Un petit bois de bouleaux nains et de saules boréals, aux troncs maigres et tortueux a poussé ici, comme incongru. En effet, les arbres et à plus forte raisons les forêts, sont rares en Islande car ils ont été quasi exterminés par les premiers habitants de l’ile et leur croissance est lente. Néanmoins des tentatives de reboisement variées sont en cours dans diverses régions.
Vous connaissez le proverbe islandais :

« Si tu es perdu dans la forêt ? Lève-toi ! »

Un petit bois de bouleaux nains et de saules boréals

Toujours des moutons sur la route, une brebis et son agneau qui tète à grands coups de tête, moutons blancs, moutons noirs, ou panachés il y en a de toutes sortes, bloqués par les barrières à bétail sur les routes, zones faites de barres métalliques rondes espacées au sol pour les empêcher de migrer d’une zone à l’autre.

Un petit pont franchit enfin la rivière Skjálfandafljót puis la piste commence à grimper, les panneaux informatifs, comme à chaque entrée de piste, font leur apparition : la F26 n’est pas loin ! En rien de temps on arrive sur un plateau avec le classique parking-toilettes : la cascade d’Aldeyjarfoss n’est pas loin !

Aldeyjarfoss

En effet on l’entend d’ici et il faut descendre un sentier tortueux pour arriver aux chutes ; en chemin, de belles échappées sur le cours encaissé de la Skjálfandafljót avec des rapides écumeux dans l’eau gris acier face à une falaise noire.

Le cours encaissé de la Skjálfandafljót

On y est : haute d’une vingtaine de mètres, la chute jaillit d’une gorge depuis un plateau pour s’épancher dans un vaste bassin entouré de colonnes d’orgues basaltiques  sombres qui contrastent d’autant mieux avec l’écume blanche de la chute.

La chute d’ Aldeyjarfoss

Comme prédit par nos hôtes de Laugar, elle est magnifique et bien moins fréquentée qu’en aval à Godafoss, à tort car le spectacle est plus impressionnant et plus tumultueux qu’à Godafoss ; si vous passez par là, vous savez ce qui vous reste à faire !

Aldeyjarfoss au ralenti

Les rangs d’orgues basaltiques sont tantôt réguliers et verticaux, tantôt en gerbes arrondies ou désordonnées, preuve de l’activité intense qui a dû avoir lieu lors de l’éruption, des couches successives s’empilent même comme des voutes.

La piste F26 ou Sprengisandur

La piste F26, appelée aussi Sprengisandur par les locaux, est l’autre piste traversant l’île dans le sens nord-sud, mais les islandais préféraient la Kjöllur, (que nous avons emprunté le 1er jour), car la Sprengisandur jouissait d’une mauvaise réputation. Mauvaise réputation due aux elfes, trolls et fantômes des légendes, mais surtout aux hors la loi réfugiés ici à cause de l’isolement. C’est aussi le manque de pâtures pour les chevaux lors des haltes qui a donné le nom de Sprengisandur, « étendues de sable épuisante ».

Le pont marque le début de la piste qui débute dans un paysage de sables foncés, avec des touffes de végétation éparses de plus en plus rares, une autre cascade, Hradnabjargsfoss, se situe un peu plus loin.
La piste monte toujours, curieusement en suivant la ligne de crête reliant touts les points hauts, les uns après les autres.
Depuis la cascade, nous avons monté en quelques kilomètres de 300m d’altitude, et dès qu’on approche les 600-700m, la brume est présente pour se transformer en pluie, voir en grésil et neige fondue au gré de l’altitude !

Brume qui laisse parfois entrevoir à perte de vue des paysages désertiques et moutonnés de rochers et cailloux, semblables à l’Odadahraun près d’Askja, qu’on a parcouru les jours précédents. 
La conduite est difficile, non pas par l’état de la route, mais à cause de la visibilité réduite par endroits, tout en croisant aussi de drôles d’engins, comme ce camion de raid orange venu d’Allemagne.

Rencontre sur la F26

Toujours et encore des étendues de cailloux, la végétation se raréfie, seule touche de couleur, les poteaux jaunes qui balisent le bord de la piste comme partout ici. Cailloux de tailles variées, du gravillon au roc, en passant par des tailles comme un noix, une pêche ou noix de coco, voir énormes parfois !

Cailloux de toutes tailles…

La végétation devient rampante, azalées ou thym arctique, comme pour mieux se protéger du froid hivernal.
Toujours circulant sur les cimes, ce qui devrait garantir une belle vue en temps normal, ne dévoile que la désolation proche, agrémentée de plaques de neige dans les contrebas ; enfin un gué se présente, plutôt une grande flaque provenant de la fonte de neige plus loin.

Paysage lunaire ou martien, où la route se déroule jusqu’à l’horizon proche, quelques grosses super jeeps nous croisent de temps à autre ; il parait que c’est la piste d’Islande la plus fréquentée, mais ça reste somme toute assez calme ce jour…

Une petite touche de couleur avec des variations dans les laves qui rougissent par ici, ou l’approche d’un cours d’eau qui apporte avec lui un peu d’herbe et de mousse bien verte presque fluorescente sur ses bords.
Un carrefour se présente avec la F881 vers Laugafell, puis une série de petits gués qu’on franchit négligemment…

Mousse presque fluorescente

Une autre rencontre toute aussi originale qu’inattendue : un marcheur qui tire son barda derrière lui sur une remorque mono-roue, plus loin, deux autres marcheurs avancent ici au milieu de nulle part  dans cet environnement hostile : chapeau bas !
Nous sommes à peu près à 50km de la dernière ferme ; quant à la prochaine halte, qui sait ?

« Avec un ciel si bas qu’un canal s’est perdu… » chantait Jacques Brel, ici c’est un lac qui semble perdu au bord de la piste, l’eau ne doit pas être plus chaude que quelques degrés…Le ciel est comme une chape de plomb qui par moments se soulève pour nous dévoiler une chaine de montagnes blanches à l’horizon qui semble inaccessible.

Plafond bas sur la piste

Encore un étang au milieu de la piste, le passage est balisé entre des poteaux jaunes et rouges, c’est un gué original avant le croisement de la piste F752 qui rejoint la région de Skagafjördur, en passant par le refuge de Laugafell et sa source chaude.
Un panneau annonce encore 125km jusqu’à Hrauneyjar, nous avons fait la moitié du trajet en 4h y compris les arrêts photos ! A présent un vaste lac s’étire, c’est le lac de Flordungsvatn en arc de cercle qu’on longe.

Le lac de Flordungsvatn

Puis à nouveau un gué large d’une vingtaine de mètres, il y a des couloirs balisés pour bus et voiture ! Quelle organisation… Une jeep se présente en face, on attend pour voir : peu profond, ce doit être les eaux de fonte du proche glacier de Tungnafellsjökull, j’essaie de traverser à pied sur des cailloux pour prendre des photos de l’autre côté mais impossible, ça sera de l’intérieur du Land Rover !

Gué balisé : du grand luxe !

La route continue dans la sombre perspective du désert de lave, sous le manteau nuageux gris qui se lève et dévoile une bande de montagnes zébrées de neige éclatante ; quel contraste !

De plus, une zone entièrement immaculée à droite ne laisse aucun doute : c’est un glacier, le Höfsjökull à quelques kilomètres de distance à peine, séparé par une interminable plaine pierreuse. De l’autre côté se situe son homologue, le Vatnajökull et le Bardarbunga de plus de 2000m qui a fait parler de lui lors de l’éruption en début d’année lorsqu’une faille s’y est ouverte pour vomir lave et gaz.

Le ciel est tellement bas qu’on dirait que la masse nuageuse va s’écrouler sous peu…Toujours de l’avant vers cette fenêtre étroite sur l’horizon, en doublant à présent un rando-cycliste et croisant le bus « spécial piste » qui assure la liaison jusqu’à Myvatn.

Le ciel va nous tomber sur la tête ?

Rencontres de 3 types :

Au long de la route désertique et désertée , on croise néanmoins de drôles de rencontres : soit des véhicules dignes du Paris-Dakkar, poids lourds suréquipés ou SUV améliorés qui viennent pour se mesurer à l’Islande (et si je pouvais mettre un plus grand “I” à Islande…). Ou de simples individus, un marcheur avec tout son paquetage sur le dos et emmitouflé dans son K-way qui avance dans la brume au rythme de ses bâtons de marche….Ou encore celui qui tire son barda derrière lui sur une remorque à une roue.

Marcheur solitaire

Ils méritent le respect : on est ici à des dizaines de kilomètres de la dernière habitation, la piste est loin d’être plane, on grimpe parfois à plus de 700m avec de la neige fondue ; et il y a les gués à traverser a pied !
Je repense à H. Guillaumet, pionnier de l’aéropostale, qui disait à St Exupéry venu le secourir : “Ce que j’ai fait, aucune bête ne l’aurait fait.”. Ici il n’y a même pas de bêtes…

Nyidalur, la « nouvelle vallée »

Juste avant le refuge de Nyidalur, c’est le croisement avec la F910 qui vient de l’Askja, notre refuge de l’avant-veille ; piste très dure et éprouvante réservée aux super jeeps et fortement déconseillée voire interdite aux 4×4 classiques. Sur certains tronçons la moyenne est de 10km/h, on dit qu’il faut 10 heures pour parcourir les 100km ! Pour nous la question ne s’est pas posée…

Enfin voici le gué tant redouté de Nyidalur ; annoncé comme le plus risqué du parcours, il est recommandé de partir tôt pour le franchir avant que le soleil n’ait trop provoqué de fonte dans les glaciers. En fait, aujourd’hui on ne risque pas de coup de soleil et c’est à peine un ruisselet, un des plus petits qu’on ait vu…On l’a échappé belle !

Les gués, c’est gai !

Les super jeeps des services de secours qui patrouillent là semblent disproportionnées par rapport à la difficulté mais ils sont bien équipés en Islande ; le bus et le SUV devant nous passent sans ralentir ; de l’autre côté attendent un 4×4 et une fourgonnette tirant une remorque, un bouchon sur la piste, un comble !

Gué de Nyidalur, les secours veillent !

Et voici Nyidalur, l’oasis dans le désert de la Sprengisandur, sans les palmiers et le soleil ! Un refuge en bois, quelques bâtiments et pas mal de monde : entre bus et 4×4, il y en a bien une douzaine de véhicules arrivés à ce bout du monde.

Le refuge de Nyidalur

Cette vallée sépare le sud du nord de l’île, but de promenades à faire ou l’ascension du proche sommet. Le refuge comporte un dortoir, chambres et toilettes dans une joyeuse agitation. Au pied du massif de Tungnajell et de son glacier, les pentes sont couvertes de neige ici aussi et l’air est comment dire…vivifiant !

Montagnes zébrées de neige

On ne s’attarde donc pas car il reste pas mal de route à parcourir et notre moyenne n’est pas élevée, non pas qu’on veuille battre des records, mais il y a encore des occasions de visite prévues pour la journée.  A franchir encore plusieurs petits gués de fonte de neige aux alentours, balisés par des piquets pour les plus larges, mais peu profonds.

Le paysage est identique au tronçon nord de la piste, sombre, caillouteux et infini : on n’a aucune idée des distances, sans repères et certains objets semblent ne jamais se rapprocher, comme dans les déserts sahariens (sans les mirages toutefois), et pourtant on avance !

Infinité désertique au long de la F26

Enfin un peu de spectacle qui se présente avec les langues glaciaires du Höfsjökull qui débordent des monts sur la droite, une très large au centre d’une dizaine de km de largeur, encadrée par deux petites sur les côtés, comme une armée blanche prête à déferler sur la plaine.

Quelques voitures, minibus surélevés qu’on croise çà et là au long de la route qui se poursuit imperturbablement dans l’immensité plate et morne avec les gués, flaques et plaques de neige qui viennent rompre la monotonie du trajet.

On the road again…

Quelques montagnes pointent à l’est tandis que le plafond nuageux remonte, donnant une meilleure visibilité sur la plaine de la Thjorsa qui nous sépare du glacier et des ses avancées, la masse de glace est imposante, même à des kilomètres de distance.
Enfin le sud, c’est bon signe ! En effet la Thjorsa est le plus grand cours d’eau d’Islande, fleuve se jetant sur la côte sud dans l’océan Atlantique.

Les langues glaciaires du Höfsjökull

La piste redescend en direction de la plaine mais remonte aussitôt comme à l’accoutumée droit vers un sommet pointu pour replonger vers un gué sur une rivière, aux berges couvertes de végétation fluo qui profite de la courte saison d’été.

Les lacs

A droite, un grand lac aux eaux bleu émeraude, c’est le Kvsilavatn qui s’étire en une série de bassins, tandis qu’un chapelet de volcans coniques se dresse vers l’est ;  ici émerge un ensemble de bâtiments métalliques incongrus en plein désert, peut être des scientifiques.

Enfin un pont enjambe une rivière large et puissante, c’est l’eau provenant du lac Kvsilavatn, et la route s’élargit sur une portion plus carrossable, jalonnée par les traditionnels piquets jaunes entre des buttes dénudées, puis émerge un autre immense lac vert émeraude, c’est le Thorisvatn.
(Vous rappelez-vous que “vatn” siginifie “eau” en islandais ? )

Enfin la civilisation réapparait sous les traits d’une ligne électrique haute tension courant sur une série de pylônes jusqu’à l’horizon et autre signe civilisé, nous roulons sur une route goudronnée avec une ligne blanche ; quel luxe !

Retour à la civilisation…

Après le carrefour avec la route du Fjallabak vers les lacs du Veidivötn, la piste F26 reprend le grade de route 26, nous apprécions le confort du ruban asphalté et son tracé amorti, par rapport aux secousses, lacets, roulis et tangage de la piste.

Halte à Hrauneyjar

La route passe à proximité de la centrale hydro-électrique de Hrauneyjafoss, par un pont au dessus des eaux de rejet de son exutoire, et immédiatement après c’est Hrauneyjar, notre but, enfin !
Hôtel, gite et guesthouse, complexe style « saloon de la dernière chance » du Far West, tel est cet endroit, dernier point de ravitaillement avant le nord ou pour l’exploration du Landmannalaugar tout proche.

Hrauneyjar

Nous y sommes déjà venus en plein hiver et ça avait alors l’air d’une station polaire arctique, avec ses bâtiments bas, la neige accumulée en congères contre ses parois et…sa solitude !  C’est ce qui a un peu motivé notre choix avec son emplacement central dans la région.

Pour l’exploration ce sera demain, pour l’instant installation ici pour deux jours, ça fera du bien de se poser un peu après la plus longue étape du périple, qui plus est sur une des pistes les plus éprouvantes et par mauvais temps, LA Sprengisandur.
Mais comme on veut profiter de la fin de la longue journée d’été, on va faire un tour à la ferme chez les Vikings…

La ferme viking de Stong

Un site d’établissement des Vikings qui a dû être occupé jusque vers 1300, a été retrouvé dans cette vallée, au pied du volcan Hekla.
Celui-ci a est entré en éruption en l’an 1104, dévastant une vingtaine de sites vikings, huit ont été fouillés mais un seul est hors sol, exhumé des cendres du volcan voisin aux éruptions quasi régulières mais sans prémices.

Une ferme médiévale, la ferme viking de Stong, a été reconstituée et reconstruite à l’identique plus bas dans la vallée au bord de la route comme une réplique de celle-ci.
Ici on retrouve les fondations en pierre avec de la tourbe et un toit en bois reconstitué, avec des vestiges d’une étable, d’une forge et église.

A partir de Hrauneyjar, on descend la route 26, puis la 32 et au pied d’une grande descente en lacets on découvre un magnifique panorama sur la vallée de Thjorsadlur avec un vrai décor extra-planétaire de cratères dispersés dans la plaine.

La vallée de Thjorsadlur
Décor extra-planétaire de cratères

Là se trouve la reconstitution de la ferme viking de Stöng, l’original se trouve à gauche, au bout d’une piste en terre de 5km ; c’est là que nous allons…

Du parking, un petit pont franchit un ruisseau et on trouve un bâtiment principal enterré et allongé, avec une petite porte latérale qui ouvre sur un vaste intérieur de 15m sur 5m de large environ. Des murs en pierre recouverts de plaques de tourbe avec un foyer central entre des dalles de pierre. Le pourtour consiste en des banquettes recouvertes de tourbe ; les vikings avaient déjà découvert ses propriétés isolantes !

Des banquettes recouvertes de tourbe

Deux petits appentis, une réserve et des toilettes, déjà…La toiture de protection en bois a été bien sûr reconstruite car détruite par l’éruption. L’ensemble est très grand vu de l’intérieur, comme il est enterré, l’extérieur ne paie pas de mine.

L’intérieur de la ferme viking de Stong

L’oasis dans le désert : Gjain

De là, une piste caillouteuse atteind un plateau pour rejoindre la véritable oasis de verdure et de cascades qu’est le canyon de Gjain, inattendu au milieu d’un paysage de laves austères.
Un sentier descend dans le canyon creusé par les cours d’eau ; plusieurs pontets et sentes aménagés permettent de s’y promener entre grottes, ruisseaux et cascades.
Mais pas de palmiers ici…

L’oasis dans le désert : Gjain

 Beaucoup de verdure qui contraste avec les alentours arides :  saules nains, fleurs, angéliques, dans un décor d’orgues basaltiques figées, l’eau est partout sous nos pieds…
Le clou du spectacle étant les cascades au fond du cirque qui s’écoulent non pas à la verticale mais pour une fois, dévalent le long de pentes inclinées.

Cascades de Gjain

Des cavernes noires béantes hors des tours de lave sombre semblent abriter tous les personnages de la mythologie islandaise et on ne serait pas étonné d’en voir sortir elfes et trolls à la nuit tombée…
Il y a des vestiges de murets à l’entrée, elles ont dû servir de parcage pour les moutons autrefois.

Des cavernes noires béantes

Retour en sens inverse à notre base de Hrauneyjar par la vallée de Thjorsadlur qui abrite Stông et son vaste paysage de monticules à l’aspect lunaire.

La fin d’une longue journée : probablement l’étape la plus longue de notre périple à travers l’Islande avec cette traversée nord-sud par une piste redoutée mais riche de découvertes en lieux insolites, paysages et rencontres.

L’itinéraire du jour de Laugar à Hrauneyjar

Au programme demain : la région géothermique du Landmannalaugar !

Un autre monde : bienvenue en enfer !

Voyage en enfer

Réveil au camp de Kerlingarfjöll, nous sommes en plein milieu de l’Islande dans notre chalet miniature, arrivés de Reykjavik la veille…

Au refuge de Kerlingarfjöll

Le plafond nuageux est si bas qu’on ne sait pas si c’est les nuages qui sont descendus ou le brouillard qui est monté…
Le petit déjeuner est servi  dans l’autre bâtiment où se situe la salle commune et l’accueil : cérémonie des chaussures à l’entrée, comme c’est la coutume dans tous les pays nordiques, et premier déjeuner islandais avec charcuterie, fromage, skyr (yaourt épais aux fruits), pains maison, confiture etc…
Rien que du calorique tout ce qu’il nous faut pour notre expédition du jour ! Il y a déjà plusieurs personnes de tous âges, même avec des enfants en bas âge, ou des personnes d’un certain âge, comme quoi on trouve de tout dans ce bout du monde au milieu du pays…

Avant de partir, je demande à la gardienne le chemin pour se rendre sur la zone géothermique avec ma carte ; elle me dit :” I have a better one ! ” (J’en ai une bien meilleure !), et me donne une carte détaillée des environs. Le site est à 2h de marche environ ou 1/4h en voiture ; le choix est vite fait vu notre emploi du temps chargé pour la journée et la météo bouchée.

La piste démarre juste derrière le campement et monte carrément sur la crête de la colline, mais la vue est très limitée à quelques mètres par le brouillard épais. On espère que le temps va se lever par la suite…en naviguant à vue et suivant les rares panneaux, on descend, remonte pour traverser dans un creux une zone neigeuse, a moitié fondue avec des ornières de boue de 25 à 30 cm tracée entre deux pans de neige de 1 m de haut !!!
Pas question donc de passer à côté…Donc, passage du Land Rover en boite courte, petite vitesse et en avant ! Sur le côté et en diagonale pour ne pas avoir les 4 roues dans les ornières, ça patine un peu mais ça passe !

Land Rover et la cabane au fond du…désert !

Laborieusement et lentement, on continue de gravir les pentes pour finalement arriver sur un plateau désertique avec un abri-refuge caractéristique en Islande en « V » inversé, la piste s’arrête un peu plus loin, barrée par des lourds blocs de pierre, personne d’autre…
Dès qu’on arrête le moteur et descend de voiture, on entend un souffle et des bruits irréguliers, comme des « ploups » de temps en temps.

A quelques mètres du parking le sol est perforé de trous d’où s’échappe de la vapeur et l’odeur sulfurée ne fait aucun doute, on voit quelques évents colorés de gris, où la vapeur soufrée changée en acide sulfurique a transformé la lave en glaise grisâtre, et d’autres zones colorées en jaunes-orange et rouge avec des dépôts de souffre ou de rhyolite.

Les montagnes de la femme troll

C’est en effet la traduction de Kerlingarfjöll, femme troll qui devait être la sœur du géant Surtur dans la mythologie nordique…Un jour elle n’est pas rentrée à l’abri avant le lever du jour et a été transformée en pierre comme tous les trolls, mais vous le savez déjà probablement…
A proximité du glacier de Höfsjokull, haut de 600m à 800m, le massif de Kerlingarfjöll a été formé par des éruptions sub-glaciaires à la fin de l’âge de glace.
La rhyolite (roche volcanique orangée typique d’éruption sous la glace) et la caldera (cuvette volcanique) témoignent d’un volcan central, éteint depuis des milliers d’années, certaines rhyolites sont recouvertes de lave ce qui est assez rare.

Le sentier se poursuit pile sur la crête de la colline vers l’inconnu …

Le sentier se poursuit après les panneaux explicatifs et file droit, pile sur la crête de la colline vers l’inconnu ; à droite on entrevoit dans le brouillard une rivière qui serpente entre des versants colorés et enneigés.

Le site se dévoile soudain hors de la brume, avec ses fumerolles et ses colorations caractéristiques. Juste après, un escalier à pic taillé à flanc de montagne plonge dans la vallée avec ses vapeurs incertaines et ses bruits inquiétants dans la brume.

Le site de Kerlingarfjöll : descente en enfer ?

Bienvenue en enfer !

Le site est impressionnant par ses vues à pic et ses palettes de couleurs même atténuées par la brume, ce qui le rend encore plus mystérieux car on ne les découvre que par à coups. Les paquets de neige donnent une allure fantasmagorique en plus, avec quelques traces de verdure presque incongrues dans ce décor apocalyptique.

Une vue de Kerlingarfjöll

Tel Dante accompagné de Virgile, notre descente aux enfers commence donc, depuis la crête vers le fond de la vallée encaissée et dans le brouillard ; brouillard ou fumerolles ? La descente se fait précautionneusement par l’escalier taillé dans la rhyolite orange, comme une lave recuite et érodée, très friable et glissante par temps de pluie.

La rivière elle-même semble fumer par endroits et bouillonner

Une fois arrivés au niveau de la rivière, on est entourés de jets fumants, projetant de la vapeur, la rivière elle-même semble fumer par endroits et bouillonner au milieu de la neige ; les versants des collines sont colorés de l’ocre à l’orange en passant par le jaune, du gris au mauve en passant par le bleu, l’eau elle-même passe par toutes les variations de bleus.
Sans parler du bruit incessant des jets de vapeurs et bouillonnements de tous les côtés comme des machines à vapeur discordantes et des odeurs sulfurées qui planent dans l’air !

Plusieurs ruisseaux parcourent les gorges du site, des pontons en bois permettent de passer d’une rive à l’autre, et des sentiers tracés permettent de le parcourir ; il faut éviter de s’en écarter car on n’est jamais sûr de la température et de la résistance du sol à un pas près, comme des jets de vapeurs ou des mares de boues mijotent lentement, au contraire des flaques d’eau bouillantes couvertes de bulles pressées qui parsèment le fond et les versants avoisinants. 

Dépôts de soufre et cristalisations

Au voisinage de certaines fumerolles, des dépôts de souffre et cristallisations semblent comme les croutes de la palette d’un peintre géant – peut être encore un troll mythologique – avec des jaunes, rouges, bleus, gris…

Une palette de peintre ?

Il est difficile de rendre l’ambiance de l’endroit, et de restituer les impressions tant il y a à voir et entendre !

Une autre partie de la vallée s’atteint par le passage d’un pontet en bois, un immense névé neigeux est encore là malgré les fumerolles bouillantes à quelques mètres la température ambiante n’est pas chaude.

Cette partie est plutôt l’ocre foncé de la rhyolite avec tous ses dégradés, aux versants veinés de marron foncé, gris. Une fois la montée bourbeuse franchie, un point de vue sur le confluent des vallées en bas et sur l’autre versant, raviné et coloré comme dessinant un tableau abstrait tout en dégradé de couleurs, “grandeur nature”.

Tableau abstrait grandeur nature

Tout en continuant le long de la crête d’une colline, la vue sur le versant opposé est totalement différente : la paroi est entièrement couverte de fissures d’où s’échappent des solfatares, le sol est coloré de dégradés de marron, de jaune, d’ocre, de gris, de bleus.

C’est l’opposé de l’autre versant autant il est calme et reposant, d’une teinte unie en dégradé, autant ce côté est tourmenté, balafré par les ravines et fumerolles, aux couleurs chatoyantes et variées, aux reliefs perturbés.

Comme incongru dans ce paysage perturbé, un dôme de rhyolite presque parfait tranche de ce côté du site. De plus l’atmosphère irréelle est renforcée par le brouillard ambiant et le plafond bas qui tend à donner un aspect mystérieux et dantesque à tout le paysage.

Un dôme de rhyolite presque parfait

Les fumerolles redoublent d’activité par moment ou s’amenuisent à des rythmes imprévisibles rendant la vue tantôt dégagée, tantôt bouchée. Par endroit les minéraux issus des fumerolles déposent tantôt des cristallisations superbes telle une palette de peintre desséchée, ailleurs c’est la boue desséchée qui forme comme une mosaïque antique colorée et assemblée.

Une fois parvenu au bout du sentier suivant la crête, on rebrousse chemin et redécouvre ces merveilles de part et d’autre vues sous un autre angle et toujours aussi fantastiques, mystérieuses et impressionnantes.

Comme je suis seul sur la cime entre les deux versants antagonistes, le calme et l’unité de couleur face à la débauche d’énergie et de teintes j’en profite pour faire un panorama à 360° (Cliquer sur l’image ci-dessous pour visualiser).

Panorama interactif 360° du site de Kerlingarfjöll (cliquer sur l’image)

Redescente vers les ruisseaux par le même itinéraire incertain, boueux et enneigé, décors de rhyolite orangée, sols gris de plomb, fumerolles et cristallisations, traversée de la rivière fumante et bouillonnante, pour finir par l’escalade interminable de l’escalier vers le plateau final : un vrai itinéraire digne de Bilbo le Hobbit en route pour le Mordor !

Le plafond des nuages et du brouillard s’est enfin un peu levé et dévoile mieux les parois des vallées avoisinantes avec leurs teintes et dégradés magnifiques dont nous sommes encore les seuls à jouir.

Les fumerolles sont alignées le long d’une ligne de faille

Peu de verdure dans ce monde minéral mais quelques traces quand même d’une végétation spécifique et qui a su s’adapter à ces conditions extrêmes : on trouve des mousses spécifiques à l’activité géothermique ainsi que des lichens qui ajoutent une faible touche de vert au paysage.

Depuis le parking sur le plateau, d’en haut on remarque que les fumerolles et sites géothermiques ne se limitent pas au fond de la vallée mais s’étendent aussi sur les flancs et sommets alentours suivants de lignes à peu près régulières, les failles sismiques probablement. Le Land Rover nous attend sagement alors que les voitures commencent à arriver : tant mieux, nous avons pu profiter de tout le site de Kerlingarfjöll pour nous seuls dans une ambiance mystérieuse et unique…

Il y a quand même quelques notes de verdures et de rares fleurs qui survivent dans cet environnement rude et désertique, comme la silène acaule typique avec sa coupe « en boule » et les dryades qui survivent dans les cailloux et éboulis.

Touffe de silène acaule

Retour au camp par la route avec une visibilité meilleure, la vue est dégagée à présent sur la vallée plate qui se dévoile mais le ciel est toujours plombé. Le refuge dans son écrin d’oasis verdoyante et le site grandiose et mystérieux valent bien le détour depuis la piste de Kjöllur !

Hveravellir, « le champ des sources chaudes »

Même si les pistes de l’intérieur de l’Islande sont bien moins fréquentées, on fait des drôles de rencontres, de drôles de véhicules. Que ce soit des marcheurs avec leur paquetage en plein désert de cailloux à des dizaines de kilomètres de nulle part, des cyclistes sous la pluie battante voir même un marcheur qui tirait son paquetage sur une remorque, et des bus surélevés à toute allure.

Ici c’est une « coccinelle » VW qui passe devant nous à un arrêt photo, un petit coucou, elle est passée : ce sont des allemands venus avec leur propre voiture, probablement à travers le Danemark et par ferry via les iles Féroé jusqu’à la côte est, un sacré périple !

La coccinelle en Islande…

Depuis Kerlingarfjöll nous rejoignons la piste Kjöllur en déroulant le chemin à l’envers jusqu’à la piste vers le nord pour l’étape vers Varmalid en fin de journée. La route continue vers le nord toujours ondulant dans une plaine désertique brune de cailloux avec de rares touffes de végétation. De loin en loin On aperçoit la forme caractéristique en cône des volcans classiques ou même de volcans « boucliers » moins pointus et plus avachis, ainsi que le glacier Langjökull qui se profile à l’horizon vers l’ouest.

Désert autour de la piste Kjöllur (CLIQUER SUR L’IMAGE POUR AGRANDIR)

Après une trentaine de kilomètres se présente le carrefour vers Hveravellir. C’est un autre site géothermique et une halte sur l’axe sud-nord. On y trouve aussi un refuge et un camping comme à Kerlingarfjöll mais beaucoup plus fréquenté car plus accessible depuis le nord, à deux pas de la piste principale, et surtout un petit bassin d’eau provenant d’une source chaude où l’on peut se tremper en toutes saisons. De nombreuses randonnées sont possibles autour du campement ce qui en fait un point assez fréquenté, même s’il y a moins de monde que dans le cercle d’or.

Le champ des sources chaudes

Une des premières choses qu’on rencontre, c’est un monument symbolisant deux cœurs en pierre dans une cage de fer et de roc, à la mémoire d’un hors la loi, Eyvindur, qui vécut avec sa femme dans ce désert de pierre, s’abritant dans une faille qu’il avait aménagée à côté de la source chaude. Il fallait vraiment en vouloir pour s’exiler dans un tel coin perdu…

A la mémoire d’un hors la loi, Eyvindur,

Le parcours commence autour du bassin d’eau chaude où pataugent de nombreux touristes malgré le temps frais et pluvieux : ils sont une douzaine dans le bain ! Attention ce n’est pas une piscine, juste un bassin de 4-5m de diamètre, si l’envie de vous tremper vous prend et qu’un car de touristes vient d’arriver, c’est manqué !

Le minuscule bassin (en bas à droite)

Des passerelles de bois parcourent le site de Hveravellir et permettent de franchir les marécages sans abimer la flore…

…et mènent aux premières cuvettes bouillonnantes et fumerolles très actives, ici pas d’odeurs soufrées il s’agit uniquement et heureusement que de vapeur d’eau mais très chaude !

Chaud devant !

Autour des bassins se sont déposées de concrétions typiques de l’endroit et originales de geysérite en plaque fines et concentriques qui rappellent un peu les dépôts de calcite dans les bassins des grottes souterraines.

Il y a notamment une petite vasque bleutée nommée Blahver, avec les concrétions s’étageant en pile d’assiettes qui est de toute beauté ! Un fin dépôt blanc s’est aussi solidifié vers la surface de l’eau qui semble si fragile qu’un coup de vent pourrait le casser…

Une petite vasque bleutée nommée Blahver

Plus loin un évent pyramidal qui porte le doux nom de Öskursholsver, « la source qui crie », s’est construit sur une pile de couches de geysérite et émet de la vapeur à un rythme discontinu comme une respiration en tournant suivant le vent.

Öskursholsver, « la source qui crie »

Ailleurs une autre vasque bleue fume doucement, enchâssée dans de fines couches de minéraux blancs et ocres qui se sont déposés et surplombent la surface de l’eau. Cela semble si fragile et en suspension qu’on se retiendrait presque de respirer ! Heureusement ces constructions sont assez protégées par le cheminement sur les passerelles aménagées en bois entre les vasques et évents.

Une autre vasque bleue fume doucement, enchâssée

En s’engageant sur un des sentiers qui s’enfonce dans les champs de lave alentours, à peu de distance la végétation reprend place, preuve qu’il y a de l’eau et un sol fertile et l’on a une vue globale du site avec ses trainées de vapeur à l’horizon. La sente serpente dans la lave irrégulière jusqu’à une antique bergerie semi-enterrée restaurée avec son toit de gazon- dommage que la tôle ne soit pas entièrement masquée-, ses murs de lave et son intérieur austère et rustique.

Toujours dans le désert du champ de lave, à présent très plat et très vert au contraire de Kerlingarfjöll qui est un ancien cratère, il s’agit ici d’un épanchement d’un flot de lave qui s’est solidifié, quelque fois en formant comme des bulles qui ont gonflé et fissuré en se crevant, on les surnomme des « gâteaux », certains formant des cavernes de plusieurs mètres permettant des abris naturels.

Un abri sous la lave

Rien d’autre sur des kilomètres carrés, à l’horizon des montagnes enneigées qui bordent l’extrémité nord du glacier qu’on a longé depuis hier, qui mérite bien son nom de Langjökull, le glacier long. On trouve parfois quelques touffes de fleurs mauves ou blanches, rases et par paquets.

Sporadiquement, des « gâteaux » surgissent ici et là du paysage de lave figée, bombés en un dôme presque parfait et craquelés comme s’ils avaient trop cuit !
Un des plus imposants de ce parcours est nommé Evindarett qui doit bien faire plusieurs dizaines de mètres de diamètre pour une dizaine de mètres de haut ! On raconte que c’est l’ancien parc à moutons du hors-la-loi précédemment cité.
Si vous regardez attentivement, il y a une personne debout à son sommet, cela vous donne l’échelle du gâteau !

Evindarett : si vous regardez attentivement, il y a une personne debout à son sommet…

La bulle de lave s’est fissurée en son milieu et permet de grimper à l’intérieur entre deux murs de lave jusqu’à son sommet.

De là on domine toute la plaine monotone de lave et la vue porte à des kilomètres à la ronde, jusqu’à Hveravellir qu’on reconnait à son agitation par rapport au calme d’ici…

Un petit panoramique sur la morne plaine mais qui a son charme et c’est retour vers Hveravellir sans passer par Strytur, un cratère de volcan qui semble intéressant mais encore assez loin et on doit faire des choix !
Encore de magnifiques « gâteaux » qui parsèment les alentours et dont on ne se lasse pas, un petit cône de lave et c’est le retour par un sentier en boucle qui nous ramène au point de départ.

Qui dit herbe dit moutons en Islande, on n’en verra jamais dans les déserts de pierre mais ici ils ont conquis le terrain et broutent sur le sentier ; tout doucement on les approche, car ils sont assez sauvages pour les photographier, à pas de… loup ! Et c’est la débandade…la plupart du temps par trois, il y a une brebis et ses deux agneaux des années précédentes, même s’ils sont d’un fort beau gabarit, ils la suivent encore comme leur ombre.

Plus on se rapproche du site géothermique, les vapeurs et fumerolles jaillissent du sol, ainsi que des sources de chaleur qui émanent de failles entre les rochers.
Autour de ces points chauds la végétation s’est concentrée et diffère des herbes et des mousses du champ de lave. Une multitude de petites fleurs mauves et rases, c’est du thym arctique, eh oui il pousse du thym sous ces latitudes, moins fort en parfum mais thym quand même, une espèce parmi plus de 300 !

Ici la mousse a pris une curieuse teinte jaunâtre sans doute adaptée au régime chaud et sulfuré à proximité des évents provenant du sous-sol, le sol est devenu couleur ocre rouge et se dénude au fur et à mesure qu’on se rapproche du parking. Ailleurs la mousse jaune se mêle à une autre mousse grisâtre, presque extra-terrestre d’aspect, ou est-ce la même sous d’autres aspects ? En tous cas le tableau est saisissant et impressionniste.

Ailleurs la mousse jaune se mêle à une autre mousse grisâtre, presque extra-terrestre

Depuis Hveravellir la piste continue plein nord avec la plaine qui se déroule à l’est, la route elle continue sur les points hauts, une série de cairns s’alignent sur la droite, probablement ceux placés à l’origine de la route qui étaient destinés à guider les voyageurs en hiver sans repère dans l’immensité de neige.

Cap au nord

Après avoir parcouru une trentaine de kilomètres à nouveau, le lac Blöndulon se dévoile petit à petit dans son immensité. Plus loin un point de vue surélevé après le refuge d’Afangafell permet de l’admirer : plus de dix kilomètres de long sur autant de large ! D’un bleu-gris acier entre la couche de nuages et le sol foncé de lave, l’ensemble donne froid dans le dos, la température locale et le vent soufflant y sont aussi de la partie…

Une table d’orientation situe les sommets voisins à l’horizon à 25 km, un panneau explicatif explique que ce lac de 57 km² est le premier d’une chaine de lacs reliés en cascade par des tunnels, canaux et barrages pour une capacité de 400 milliards de litres, qui aboutissent à la centrale hydro-électrique de Blanda à des dizaines de kilomètres d’ici…
Blanda est en fait le nom de la rivière issue du lac mais qui s’est trouvée privée des eaux issues du réseau des lacs, et retrouve son cours à la sortie de la centrale.

La route longe le réservoir puis passe sur une digue immense au nord et slalome entre les lacs aux noms typiques : Thistika, Fridmundavötn…jusqu’à la centrale de Blanda.

Et là…miracle : le retour de l’asphalte ! Depuis deux jours on y était plus habitués et ça fait drôle de ne plus être ballottés, avoir à déjouer les nids de poules, tôle ondulée, etc…La route amorce un large virage en descente et comme un avion nous plongeons dans le canyon de la rivière Blanda, pour rejoindre plus loin la RN1 qui ceinture l’île.

Le troll de Hvitserkur 

Un détour par la baie de Hunafloi pour revoir le rocher de Hvitserkur : c’est une formation de lave en forme d’arche de 15 m de haut, à l’écart de la côte que la mythologie locale attribue à un troll pétrifié au lever du soleil alors qu’il était occupé à lancer des pierres sur le monastère de Þingeyrar.

Le troll de Hvitserkur : un animal qui se désaltère ?

Plus géologiquement, il s’agit d’une coulée ancienne de lave qui s’est ensuite solidifiée dans un tranchée de terrains meubles ; l’érosion a lessivé les terres en laissant la coulée en arche, comme une fonderie à moule perdu…

Le rocher est de lave noire maculé de blanc par le guano des oiseaux, avec des taches et des trainées, on peut y accéder au pied à marée basse. A y regarder de plus près il semble fait non pas de lave coulée mais que celle-ci s’est solidifiée en formant des blocs comme des briques empilées. Quelques touffes d’herbes chapeautent le sommet comme une coiffure et des oiseaux nichent sur le géant pétrifié.

Au loin le fond de la baie de Hunafloi est une grande étendue sablonneuse noire, estuaire d’alluvions apportées par les fleuves depuis les glaciers au centre de l’île.

La baie immense avec Hvitserkur  à gauche

Fin de l’étape vers Varmalid, plus exactement à la guesthouse Steinstadir, un gite aménagé dans une ancienne école à 15km de là. En quittant la RN1 au hameau de Varmalid, la route s’enfonce dans une vallée, un paysage agricole de vastes prairies vertes avec des chevaux islandais typiques, même les constructions modernes reprennent le style ancien de plusieurs petites bâtisses accolées plus faciles à chauffer et à construire qu’autrefois car le bois étant rare on ne pouvait faire de grandes charpentes.

Ferme islandaise à l’ancienne

Les sommets des montagnes sont noyés dans les nuages bas, un hameau à gauche avec sa petite église, une maison cubique avec le drapeau « Farmholidays » : le gite est là, nous sommes arrivés.

Eglise à Varmalid

Une sacrée étape sur cet autre monde… Qui aurait crû que les déserts abritaient tant de couleurs ? Et on n’est pas au bout de nos surprises…

De Kerlingarfjöll à Varmalid

Démons et Merveilles

Vallée des Merveilles

Nous avons pris nos quartiers d’été en altitude dans les Alpes Maritimes au-dessus de Nice, comme les troupeaux qui montent à l’estive…

Depuis la station de Valberg, à moins d’une heure de route de Nice, et à 1700m d’altitude il fait plus frais et moins lourd qu’à Montpellier : 25° tout au plus, c’est la température de la clim à la maison, sauf qu’ici c’est naturel et l’air est léger.
De plus on a droit à un petit orage quasiment chaque jour, qui rafraîchit l’atmosphère et fait monter une senteur agréable d’humus et de terre chaude.

Comme nous y venons depuis plusieurs années nous connaissons pratiquement toutes les ressources de randonnée et points de vue, mais il n’est pas inutile de refaire une randonnée ou la visite d’un site quand on ne l’a pas faite depuis de nombreuses années.

Ça n’est pas que la montagne change tellement d’une année sur l’autre, mais les souvenirs s’estompent, et le fait de faire la visite d’une façon différente permet de redécouvrir des merveilles après 15 ans…

C’est pourquoi je vous emmène en voyage à travers le temps et l’espace, dans :

La Vallée des Merveilles

Elle se situe à côté de la vallée de la Roya, près de la ville de Tende, à deux pas de la frontière italienne, au-dessus de Menton. Cette région était encore italienne jusqu’à l’après-guerre de 1945 où les frontières furent redessinées pour l’inclure à la France. Mais il règne encore un parfum d’Italie dans les bâtiments, les façades (voir le style mussolinien de la gare…) et l’accueil des locaux.

La piste qui monte vers les Merveilles débute près de Castérino, une minuscule station marquant le  bout d’une route depuis St Dalmas de Tende où nous passons la nuit à l’hôtel (il y a 2 heures et demi de route depuis Valberg) car le départ de la visite est matinal.

On peut monter à pied depuis Castérino, mais il faut compter 3h00 de marche sur 7,5 km avec un dénivelé de plus de 700 mètres pour atteindre seulement l’entrée du site, le refuge des Merveilles, au bord du lac Long.
Ensuite entre 2h30 à 4h00 sont nécessaires pour découvrir les gravures tout au long du GR52 et des sentiers ; et à nouveau 3h00 pour la redescente quoique ça doit aller un plus vite…
Étant un site historique protégé inclus dans le Parc National du Mercantour, de ce fait on n’a pas le droit de sortir des sentiers et on doit se contenter de voir la plupart des gravures importantes expliquées, mais pas toutes.

Cette vallée renferme plus de 40 000 gravures très stylisées qui représentent principalement des têtes de taureaux, des attelages, des armes et des quadrillages qui pourraient symboliser des champs. Les recherches archéologiques montrent que cet endroit était probablement un sanctuaire, où les populations agropastorales de la région rendaient un culte à la fécondité de la terre.

Gravures stylisées

C’est pourquoi nous avons donc choisi d’effectuer la visite avec un guide agréé en 4×4 qui nous véhiculera jusqu’au refuge et nous commentera  les gravures et le site et, nec plus ultra, la possibilité de sortir des sentiers pour admirer les gravures hors classe !

Bouclez votre sac, n’oubliez pas une gourde (d’eau…), lunettes et crème solaire : ça cogne à 2400m sans nuages.
Et en voiture pour la piste acrobatique qui monte au refuge des Merveilles !

En piste

Quelques kilomètres avant Castérino, une piste pentue marque le début de la montée vers la vallée des Merveilles. A quelque distance, une ancienne mine de plomb argentifère, la Minière de la Vallaura, et ses haldes sont toujours là, ses bâtiments ont été restaurés en gite pour les promeneurs, et la mine est en train d’être réhabilitée pour être visitée d’ici quelques années.

la Minière de la Vallaura

Au-dessus, par la piste caillouteuse et cahotante, on passe près du petit lac de la Minière niché entre les pentes dans les bois de mélèzes verts.

Le lac de la Minière

Au fait savez-vous que ce conifère est le seul à perdre ses aiguilles à l’automne, qui passent avant  par  de belles couleurs jaunes et orangées à l’automne pour ne laisser qu’un tronc dépouillé et noir à l’hiver. C’est aussi un bois imputrescible qu’on utilisait pour les bateaux et toujours pour les bardeaux qui recouvrent certains toits encore. Pas ou peu de sécheresse ici, cascades et sources coulent partout à côté de la piste.

La piste gravit les pentes entre les mélèzes, avec juste de quoi laisser passer un véhicule en largeur ; un croisement en sens inverse ? Peu probable, il y a juste dix guides agréés qui montent tous en matinée et redescendent en fin de journée, plus quelques pêcheurs éventuels et les bergers qui ne bougent pas.

Piste entre les mélèzes

Des échappées sur les montagnes montrent les stries laissées par les glaciers sur les roches, comme les moraines latérales déposées il y a 10 000 ans, ainsi que les minuscules traces humaines sous forme de bunkers datant de 1939-45.

Une ancienne vallée glaciaire

A travers les arbres on distingue enfin le mont Bego, imposante pyramide minérale qui culmine à plus de 2810m et qui a dû impressionner les habitants du néolithique vivant ici.

Le plus souvent la piste s’agrippe d’un côté aux rochers de la montagne, et surplombe le vide à la plus grande joie (…) des passagers !

Entre falaise et vide…

Un peu avant d’arriver au refuge, les rochers changent d’aspect, on rencontre à présent des grands blocs violets de grès chargé de fer qui lui donne cette teinte, le tout parcouru de torrents issus des nombreux lacs de la zone.

De plus en plus ardue, la piste ondule entre les moraines erratiques, le 4×4 bringuebale de tous les côtés en roulant au minimum pour éviter les secousses, sans grand succès !

Heureusement le trajet motorisé touche à sa fin à proximité du refuge sur le parking.

Le bâtiment du refuge est assez vaste et se situe au bord du lac Long dans un cadre idyllique.

A la découverte des Merveilles

Ici commence la randonnée à la découverte des gravures laissées par des peuplades il y a 4 à 5 mille  ans avant Jésus Christ, à l’âge du Bronze, dans un but encore ignoré aujourd’hui, sur les roches polies des vallées des Merveilles et de la vallée de Fontanalba juste à côté.
Des hommes ont réalisé des dizaines de milliers de gravures rupestres, à plus de deux mille mètres d’altitude, on en compte plus de 40 000 recensées à ce jour et il y en a encore à découvrir…

Depuis le refuge à 2100m le sentier emprunte le GR52, passe près du lac Mouton tout en contournant le lac Long puis en s’éloignant on domine progressivement le lac encaissé entre les pentes du mont Bego et le rocher des Merveilles.

Le lac Long

Toujours sous la présence majestueuse qui écrase le paysage, on comprend qu’il devait impressionner les peuplades du néolithique, d’autant plus que le site encaissé est sujet à des orages violents.

Sous le mont Bego

On découvre enfin une première dalle gravée avec une tête de bovidé cornée reconnaissable, motif qui va se retrouver tout au long du parcours. Ces gravures sont réalisées par « cupules », petits éclats enlevés par un outil de quartz à la surface oxydée de la pierre pour former une figure.

Une autre dalle recèle diverses gravures :

Et plus loin encore un ensemble avec de nombreux glyphes différents ; personne ne sait avec certitude la signification de ces symboles, seulement des suppositions : les têtes cornues pour des bovins, les quadrillages pour des champs, les poignards pour la force, un « Y » pour une charrue. Qui sait ?

Malheureusement depuis le début du 19e siècle où elles ont été découvertes jusqu’à récemment, certaines gravures ont été vandalisées, taguées voir volées, De plus toutes ces figures cornues, avec des poignards ou personnages dénotaient un aspect satanique au site. Ce n’est que depuis peu qu’elles sont classées monument historique et protégées sévèrement.

Toujours plus haut…A travers les rochers et éboulis où les moraines en équilibre depuis des milliers d’années semblent veiller sinistrement sur le site, le sentier se fraye un passage. Pas étonnant que ce lieu ait effrayé les voyageurs passant par ces cols au cours des âges avec ces figures et rocs menaçants, d’où le nom d’un pic, Cime du Diable.

Certaines figures sont dans un cartouche, comme un enclos :

Tête cornue dans un enclos

Le GR longe une paroi comme vitrifiée, aux strates tantôt verticales, tantôt horizontales,  qui montre un basculement énorme dû aux plissements des Alpes.

Paroi de grès polie par les glaciers

Tout est calme, sans un bruit à part les sifflements des marmottes dans cette vallée ; en suivant le sentier au détour d’un lacet, le bruit chuintant d’un torrent emplit soudainement l’air.

Le torrent des Merveilles

 On le franchit sur une passerelle de bois pour découvrir sur une paroi la gravure dite de la figure du Christ.

La figure du Christ

En fait il s’agit de plusieurs gravures superposées, un « V » avec le bas qui est une tête cornue, puis humanisée avec l’ajout du demi-cercle supérieur et des yeux et un « T » pour le nez et les sourcils…

Par un passage sous roche on progresse vers le lac des Merveilles enfin tout proche pour la pause de midi !

Le lac des Merveilles

Environnés de marmottes sifflantes mais quasi invisibles, il faut attendre qu’elles bougent pour se dévoiler ! En face de nous sur la paroi rocheuse, l’une profite du soleil…

…ou l’autre vaque à ses occupations.

Après la pause casse-croute, notre cheminement contourne le lac pour emprunter l’ancien tracé du GR52 en s’élevant sensiblement parmi les fleurs d’été comme ces œillets sauvages minuscules.

Baleines et sorcier

En s’écartant du sentier accompagné de notre guide, il va nous montrer quelques formations rocheuses caractéristiques : les « dos de baleine », ce sont des roches arrondies, polies tout en longueur par le lent passage des glaciers, s’étirant sur une centaine de mètres ; vers 2400m d’altitude il fallait encore une certaine épaisseur de glace pour polir ces roches.

Dos de baleine

D’en haut sous le Rocher des Merveilles la vue jusqu’au lac Long est fantastique…

Panorama sur les lacs

Quelque part dans un endroit caché dans les rochers se cache la figure iconique du site, l’emblème de la région, le fameux « sorcier » personnage aux bras levés, tenant deux poignards comme lançant une incantation face au Bego.

Le Sorcier des Merveilles

Les rochers usés en longs arrondis avec des teintes pastel forment un paysage digne d’un tableau.

Plus bas en redescendant vers le lac un autre ensemble des gravures se trouve sur le flanc d’un de ces blocs.

Il est temps de redescendre vers le refuge en rejoignant le sentier au niveau de la tête du Christ, puis dévaler sous le soleil  le chemin de retour, on sent nettement la chaleur revenir au fur et à mesure qu’on diminue en altitude.

Juste avant d’arriver au refuge, une marmotte se prélasse au soleil sur un rocher, mais les yeux ouverts ; on ne sait jamais d’où peut venir le danger !

Sieste de marmotte

On aimerait bien l’imiter mais il faut prendre la piste infernale du retour…

Enfin la route depuis Castérino, en passant par l’autoroute Vingtimille-Nice pour le retour au bercail valbergan pour un repos bien mérité , à soigner courbatures, coups de soleil et..

é-Merveillés !

Vallée des Merveilles
Panorama sur la vallée des Merveilles (cliquez sur l’image pour agrandir)